vendredi 13 septembre 2013

LETTRES FAUVES #3

Mon Léon,

Demain tu auras trois mois. Je te regarde dormir, oh si tu savais le nombre d'heures passées à te regarder dormir. A te bercer en chantant cette chanson d'Emilie Simon je t'attends là je t'attends là je t'attends là sous les étoiles le ciel est si grand, et puis Jardin d'hiver et La javanaise aussi. Oh. Si tu savais comme mon amour pour toi me dévore littéralement le ventre, me tord au-dedans, me fait battre le coeur plus fort que jamais. Boum boum boum. Boum, tes yeux mer du nord, tes petites respirations, tes sourires si grands qu'ils prennent la moitié de ton visage. Boum, quand tu as mal, quand tu pleures. Boum, tout ça et puis tout le reste. Je suis ta mère, il y a trois mois je rentrais à l'hopital un peu tremblante encore enfant. Tu as fait de nous des parents, des tout-tout-petits parents de vingt-deux puis vingt-trois ans. La vie d'avant je l'ai tant aimée mais celle d'aujourd'hui je la dévore avec ses montagnes russes, ses ni oui ni non, ses petites victoires et ses labyrinthes, ses tartes poire-chocolat tard le soir. Mon trésor, mon lapin, ma canaille, mon fauve, mon confetti. Je voudrais me souvenir de ton odeur de Mustela et d'huile douce de Bonpoint, des matins où l'on reste tous les trois à se câliner dans le grand lit, des deux ou trois langes que tu serres contre toi pour trouver le sommeil, des soirs où tu ne trouves l'apaisement qu'au bout de longues heures collé à moi, ces mêmes soirs où je m'endors en même temps que toi épuisée et bercée par mes propres mots doux, de la fierté dans tes yeux et de notre fierté d'être les parents d'une toute petite personne aussi parfaite que toi. On va l'embrasser la vie à trois, on ira t'acheter un cerf-volant puis on partira à la mer au tout petit matin, on dansera comme on danse déjà depuis que tu es au-dedans de moi, on lira Max et les maximonstres puis un jour tu nous le liras à ton tour, on fera des goûters de rois, on ira respirer l'air des forêts et celui des musées. Mais reste encore un petit peu petit, mon tout petit, reste encore cette toute petite vie que je peux serrer contre moi, que je peux respirer à m'en faire tourner la tête et caresser tendrement, toujours très tendrement. Je ne sais pas ce que tu garderas de moi, de nous, de notre nid si petit mais moi j'en garderai la douceur, celle de devenir mère, ta mère.

LETTRES FAUVES #2


Vingt jours fauves ; la petite odeur de ton corps chaud disparue mais dont je me souviendrai toute ma vie, mes larmes dès que tu pleurais à la maternité, notre euphorie des premiers instants où l’on se répétait comme tu es magnifique comme c’est fou d’être des parents comme c’est bon que tu sois ici avec nous, les nuits tous les trois dans la chambre serrés collés pour se tenir au chaud et s’entendre respirer à l’unisson, ma peau nue et ta peau nue, ton (re)père qui te berce dans les couloirs, tout ce sang que je perds et qui a l’odeur de l’accouchement, toi si petit que j’ai mis au monde, toi l’évidence et l’explosion, toi qui m’a rendue mille fois plus amoureuse de ton père, toi que je dévore des yeux des mains du nez, tes contours que je sais par coeur, tes petits airs de grande personne qui nous font rire encore et encore, ta respiration de nuit à quelques centimètres de moi, la main que je pose sur ta poitrine quand tu t’agites, ton souffle dans mon cou qui me rassure à mon tour, la javanaise que je te chante doucement, le bain où tu t’endors, fauve/blizzard qui te calme instantanément, 
/ la vie mon Léon, la vie, la vie, la vie.

LETTRES FAUVES #1


Tu aimeras sans doute les oursons, les zèbres, les lions, il parait que tu reconnaitras la musique que je passe en boucle pendant ma grossesse / je me demande si c’est la meilleure chose au monde que tu reconnaisses Nuits fauves, en fait. Tu seras notre Oscar Basile Zéphyr Léon Gustave Marius Lucien – biffez les mentions inutiles – notre tout premier enfant, notre toute première fois. Tu auras vite fait le tour du petit appartement, quand tu te mettras à ramper comme un petit animal sur le parquet froid, mais tu verras qu’on peut faire grand dans très petit, tu verras combien on va s’aimer là-dedans, t’aimer du haut de nos vingt-deux, vingt-trois ans en bandoulière.